Le quartier du Mas de la Raz s’implante dans la ZAC (zone d’aménagement concerté) de Perredière. Dans cette ZAC se construisent trois quartiers de la Ville nouvelle : Le Mas de la Raz et les Armières sur Villefontaine et Les Moines à Saint-Quentin-Fallavier. Le Mas-de-la-Raz est le troisième quartier de la construction de la Ville nouvelle, commencé en 1977 et inauguré en 1980.
Dans ce quartier, il est prévu en 1977 de construire 452 logements réalisés par le groupement Interabeau, pour accueillir environ 1400 habitants. Le nombre de logements et d’habitants est limité par la géographie du site et la part importante laissée aux logements individuels.
C’est un quartier complètement pensé, réfléchi, construit sur un territoire presque vierge. C’était presque que des champs. Pour l’anecdote, la dernière récolte était du maïs. La conception de ce quartier a été travaillée, jusqu’à réfléchir à la vie sociale créée par l’espace urbain, architectural et paysager. Il s’avère que ce quartier a permis une expérimentation sociale.
On appelle l’habitant du Mas de la Raz le « madrazien ».
Description
Le quartier du Mas-de-la-Raz est presque un seul lotissement.
Urbanisme et logements
Ce lotissement important (18 hectares, avec une densité de 25,1 logements par hectare), dessinés par le cabinet d’architectes E. Gachon et construits par les sociétés HLM Lyonnaise d’HLM Logirel et la Société villeurbannaise HLM, comprend à la construction du lotissement 253 logements collectifs et 67 logements individuels, allant du T2 au T5 en habitat collectif, et de T4 au T7 (un seul) en logement individuel.
Le lotissement est sur des couleurs entre le rose, le beige et le rose foncé. Il se découpe en 5 îlots rayonnants autour d’une place centrale, doté d’un petit centre commercial (maison de quartier, épicerie, coiffeur, pharmacie). Ces îlots sont séparés par des espaces verts avec 2 mails piétonniers ou par la rue du Vellein. 4 îlots comprennent des maisons individuelles, le plus souvent groupées ou alignées en bandes, avec garages accolés le long des voies de desserte automobile et entourant 5 immeubles collectifs, qui forment le cinquième îlot. Ce dernier îlot est situé en bordure d’un petit bois à l’ouest. Les accès au quartier se font par trois axes routiers : les rues du Vellein, de la Raz et Jean Moulin.
Les circulations piétonnes avec placettes et bancs, sont traitées en enrobé rouge autour du collectif. Les passages sous porche des maisons individuelles et les trottoirs gravillonnés le long des voies permettent la jonction à l’espace central collectif résidentiel n°5 (les immeubles), situés à la croisée de 2 mails piétonniers Est-Ouest et Nord-Sud. Ces deux mails relient l’opération à l’école (GS8) et à l’espace sportif de Perredière. Ils sont bordés d’espaces verts. La circulation automobile, traitée en enrobé noir avec des ralentisseurs, distribue les garages du collectif. Ceux-ci sont organisés sous un à trois niveaux de terrasses formant des aires de stationnement avec un garde-corps traités en bas à fleurs. Des escaliers relient ces niveaux à celui de l’entrée des immeubles. Pour l’habitat individuel, la voirie distribue les accès en béton aux garages individuels, avec des aires de stationnement autour des placettes. Les abords de voirie sont traités en pelouse et arbres.
Ce lotissement est livré en 3 dates : juillet 1979, avril 1980 et septembre 1981.
On trouve également d’autres lotissements :
– le lotissement La Peupleraie, situé Rue Jean Moulin, Rue du Vellein et Impasse Vincent Scotto. Il comprend 132 logements individuel en accession dès leur construction. On y trouve 32 T4, 85 T5 et 15 T6. Cette opération s’est faite conjointement au lotissement principal. Elle est livrée en 1979. Ces immeubles intermédiaires à deux niveaux se compose de deux appartements : l’un avec du terrain et celui du haut avec une grande terrasse.
– Le Clos du Grillé, situé au nord de l’avenue du Vellein et à l’est de la rue de la Raz, est composé de 15 lots sur 1,47 hectare.
– En bordure du Village, au sud de l’avenue du Vellein, il y a le lotissement Le Clos des Avilles. Livré en 1978, il compte 9 lots.
– Le Clos du Charmaï, livré en 1983, il comprend 12 lots sur 1,26 hectare. Ce lotissement est situé au sud de l’avenue du Vellein. On y accède au même endroit que Le Clos des Avilles.
– Livré en 1981, les Hauts du Layet est un lotissement entre le lotissement principal du Mas de la Raz et le Clos du Charmaï. Il comprend 20 maisons en accession à la propriété, des T4 et des T5. Ce lotissement se situe à l’emplacement de l’ancienne maison forte du Layet et de la ferme qui en a pris ensuite la place. Un cheminement piéton, au-dessus des arcs de décharge de l’ancienne maison forte, permet de ne pas avoir à emprunter l’accès automobile en hélice. Cette impasse donne sur l’avenue du Vellein.
En 2017, le Dauphiné Libéré indiquait que ce quartier abritait 1 500 habitants environ. Des logements sociaux sont proposés à la vente et la part initiale de logements mis à la location sur le quartier (environ 40% à sa construction) tend à diminuer.
Les équipements
Il y a que deux équipements publics réalisés dont l’école primaire, regroupant une école maternelle et une école élémentaire, située à proximité de l’étang, en bas du quartier du Mas de la Raz.
La présence de l’étang permet d’imaginer une fonction de loisirs dépassant largement le cadre d’utilisation par le voisinage. Une base de loisirs est pensée autour de l’étang de Fallavier pour accueillir l’ensemble de la population de la Ville nouvelle.
Dans le cadre de la base de loisirs, on réalisera un centre aéré pour l’animation enfance de l’ouest de la Ville nouvelle, la population du quartier étant estimée insuffisante en nombre.
Au groupe scolaire, on ajoute une maison de quartier en son sein, un centre de loisirs associé à l’école, un petit centre social, une PMI (protection maternelle et infantile) et un élément de base nautique. Tout cela est détaillé dans la partie sur le groupe scolaire (GS8). Le groupe scolaire est pensé comme la liaison entre l’étang et le quartier du Mas de la Raz.
La base nautique doit être construite par tranche. La première se déroulant en même temps que la construction du quartier du Mas de la Raz.
La base nautique accueillera une activité d’optimistes sur l’étang.
Analyse
Une expérimentation de mixité sociale
On expérimente dans ce quartier la mixité sociale : les différents îlots du quartier mélangent logements sociaux et logements privés, habitat collectif, habitat intermédiaire et maisons individuelles. Les constructeurs ont accepté une répartition géographique dispersée. Les habitants apprécient l’équilibre urbanistique des petites maisons et des immeubles, l’aspect non compact du quartier.
Toujours dans cette idée de mixité sociale, les modes de financement sont mélangés. Ainsi, dans la même rue, on trouve 5 villas en location, 12 en accession à la propriété, 4 logements intermédiaires en location, … Le mixage des statuts d’occupation s’est fait dans une architecture absolument identique, y compris la surface du terrain ou la couleur des volets. Ainsi, cohabitent côte à côte des locataires et des propriétaires sans qu’aucune différence dans leur habitation soit visible.
La voirie et les réseaux desservant les habitants font parti intégrante de la réflexion de construction du quartier et ont été confiés exceptionnellement au groupement de maîtres d’ouvrage par la Ville nouvelle, pour assurer une unité et une cohérence du quartier.
L’esprit village
Le Mas-de-la-Raz est pensé comme un village, avec des architectures plutôt sobres, une construction des îlots en cercle, avec un centre commercial au centre, accessible par des voies piétonnes importantes. Pour autant, il n’y a pas de services publics installés dans ce quartier. Les habitants témoignent de calme, voire de silence, dans ce quartier, comme à la campagne. Mais aussi, on se plaint d’un sentiment d’isolement, de solitude, de la difficulté de se repérer pour les visiteurs.
Dans cet esprit village, quatre locaux collectifs résidentiels sont répartis près des immeubles collectifs sur des placettes : le LCR Louise Michel, LCR Steve Biko, LCR Vincent Scotto et LCR Jean Moulin (?). Le LCR Steve Biko était le seul dont la destination n’était pas spécifique aux habitants : il pouvait être loué pour des fêtes familiales et pour un public au-delà du Mas-de-la-Raz.
La numérotation des maisons est un système kilométrique, puis les pavillons sont numérotés les uns après les autres. Par exemple, on trouve sur l’avenue du Vellein, le 77, le 79, puis le 105.
L’esprit pionnier des Madraziens
Le quartier du Mas-de-la-Raz correspond au slogan de la Ville nouvelle de L’Isle d’Abeau« la ville à la campagne ». La proximité avec l’étang de Fallavier est importante pour les habitants. Ils peuvent en faire le tour en famille, être en contact avec la faune et la flore très facilement. On choisit sa maison en fonction de sa vue, puisque le quartier, entre l’étang ou l’école et le centre du quartier est en pente. L’aspect nature est même important pour les habitants des immeubles : l’appartement s’ouvre sur une grande loggia, espace de transition, véritable pièce en plein air, avec des bacs à fleurs en béton. Les ascenseurs permettent de mettre les vélos et les poussettes.
Une étude raconte l’arrivée des nouveaux habitants dans le quartier, qui doivent lutter contre les serpents qui tombent des arbres, et surtout qui doivent s’approprier ce nouveau lieu de vie. Les jardins se peuplent de balançoires et d’abris de jardins, voire même d’aménagement du terrain, en terrasse pour utiliser l’espace vacant de la pente. Les barrières délimitant les jardins d’origine sont changées pour se personnaliser. A l’origine, les petites cours devant les maisons n’étaient pas fermées : les habitants (sans distinction entre propriétaires et locataires) ont mis des barrières en raison du vagabondage des chiens notamment.
Les logettes à poubelles sont modifiées. Les habitants s’interrogent sur les bancs en béton utilisés verticalement pour faire les cloisons de ces logettes. L’aménageur des espaces extérieurs a ensuite, utilisé les cloisons des logettes à poubelles pour en faire des bancs.
Des cheminements piétons sauvages se dessinent sur les pelouses séparant les îlots et montrent des usages non pensés lors de la création du quartier.
Les coulées vertes qui séparent les îlots ressemblent à des prés communaux. Ce sont des espaces vides, où il peut se passer quelque chose sans que ce soit défini à l’avance.
On remarque qu’à la construction du quartier, il y avait une fontaine au centre du mail piéton, vers la placette centrale. Comme des enfants en buvaient l’eau, les propriétaires ont fait déplacé la fontaine et elle a été transformée en bac à fleurs.
La sociabilité du quartier
La sociabilité du quartier naît des lieux communs (LCR), des lieux publics et collectifs. L’appropriation de ces espaces est géré par le groupement social villageois.
Cette sociabilité est, comme de partout, liée à l’école, avec des flux qui convergent vers le bas du quartier, cette école à proximité de l’étang. Mais, on la trouve également au niveaux des boîtes aux lettres regroupées en cidex, favorisant les échanges de voisinage, inter-personnels.
Dans l’étude qui est la base de cette présentation, réalisée pendant les premières années (approximativement entre 1981 et 1988), il est remarqué l’aspect très gynécée de ce quartier, avec peu d’hommes participant à la vie sociale du quartier, en raison de l’absence d’espaces de travail sur le quartier. En effet, c’est une vaste maison, avec les femmes au foyer présentes, ainsi que les enfants. On trouve une complète vie sociale en fin de semaine, lorsque les familles sont réunies.
Les immeubles ont été conçus avec un hall collectif desservant trois appartements à chaque étage (les trois ailes de chaque immeuble).
Les cheminements
Il est remarqué les difficultés pour se repérer dans le quartier. Les lieux de repère étaient difficiles à trouver lors de l’installation des premiers habitants. Toutefois, les enfants peuvent se délecter des petits cheminements piétons entre les maisons, se transformant en labyrinthe formidable.
On trouve des colonnes « Morris » dans le quartier. Il s’agit en fait de tuyaux collecteur posés verticalement pour permettre l’affichage. Leur installation a été saluée pour leur aspect pratique, et également décrié pour des raisons « d’hygiène ». Mais, ils sont des repères dans le quartier.
Comme indiqué par un architecte impliqué dans la construction du quartier, on ne rentre pas en voiture dans le quartier : on le contourne, on tourne autour. La rue au sens classique du terme n’existe pas. C’est le cas pour un certain nombre de quartiers de Villefontaine.
L’îlot situé de l’autre côté de l’avenue du Vellein, est celui qui possède le moins d’espaces verts publics. Il se démarque par des parcelles plus grandes pour l’habitat individuel, avec des maisons dont on peut faire le tour. On note peu de trottoirs. Ce qui coupe cet îlot du reste de l’ensemble est l’avenue du Vellein. Le passage souterrain prévu pour accéder à l’école sans avoir à traverser cette route a fait l’objet très rapidement de critiques : faiblesse de l’éclairage, présence de serpents, crainte du « troisième homme ». Pour y accéder, le cheminement n’est pas goudronné, les escaliers mal entretenus. Dans le projet initial, une passerelle devait relier cet îlot au reste du quartier. Pour information, au début, il n’y avait pas de feux à l’intersection de la rue de la Raz et de l’avenue du Vellein. Ils ont été posés suite à un ou deux accidents, heureusement sans gravité, et à l’occupation de la voie par les habitants.